Autographes musicaux
L’Hôtel de Conny abrite près de 300 autographes musicaux et plus de 250 autographes de musiciens (catalogue en cours d’établissement). Parmi les principaux autographes musicaux : un cahier manuscrit de romances avec accompagnement de harpe portant le supra libris d’Aurore de Saxe (ill.), le manuscrit de la Sonate pour piano et violoncelle d’Henri Duparc ; un ensemble de 85 manuscrits de Jean-Baptiste Faure.

Sonate pour piano et violoncelle d’Henri Duparc
Manuscrit musical autographe signé, Sonate pour Piano et Violoncelle (1867-1869) ; 25 pages in-f°.
Le manuscrit, à l’encre brune sur feuillets simples ou doubles de papier Lard-Esnault à 5 systèmes de 3 portées, est signé à la fin des initiales « HD. ». Il présente quelques ratures et corrections. Trois feuillets ont été numérotés par Duparc (la pagination complète est tardive, de 1 à 26 dont la p. 16 blanche). En tête, il porte cette dédicace : « à mon cher frère » / souvenir affectueux / H. » Le dédicataire est son frère aîné Arthur Fouques-Duparc (1842-1915).
Il s’agit de l’unique manuscrit de musique de chambre conservé d’Henri Duparc, qui détruisit la plupart de ses compositions. Le manuscrit a été acquis par le Fonds Pierre-Bassot par souscription (cf. la lettre du Fonds Pierre Bassot n° 8 (2023-1er trim. 2024).

Henri Fouques-Duparc, dit Duparc est né à Paris, le 21 janvier 1848. Élève au Collège des Jésuites de Vaugirard, sa vocation fut éveillée par César Franck, qui enseignait le piano dans l’établissement. Après avoir terminé ses études de droit, il se consacra à la musique. Mais sa carrière fut courte, la maladie l’ayant contraint à un repos forcé avant qu’il n’eût atteint la quarantaine. Il avait gardé sa lucidité, mais il lui était désormais impossible de composer. « Je vis dans le regret de ce que je n’ai pas fait, sans m’occuper du peu que j’ai fait » disait-il. Il se retira d’abord à Vevey, en Suisse, puis à Mont-de-Marsan où il mourut âgé de quatre-vingt-cinq ans. Il écrivit les mélodies qui font sa gloire et qui constituent la presque totalité de son œuvre entre 1868 et 1885 : Lamento, Soupir, Chanson triste (1868), Au pays où se fait la guerre (1869), L’invitation au voyage (1870), La vague et la cloche (1871), Extase (1878), Le manoir de Rosemonde (1879), La Sérénade florentine (1880), Phydilé (1882), La vie antérieure (1884) En dehors de ses mélodies, il écrivit Feuilles volantes, six pièces pour piano qu’il publia en 1869, un Poème nocturne pour orchestre et des Laendler qu’il détruisit, une sonate pour piano et violoncelle, Lénore, poème symphonique d’après la ballade de Bürger et Aux étoiles (œuvre publiée seulement en 1910), La fuite, duo pour soprano et ténor, ainsi qu’un Benedicat vobis dominus. Henri Duparc est mort à Mont-de-Marsan le 12 février 1933 (notice rédigée par Pierre Bassot, 2007).
Les manuscrits musicaux de Jean-Baptiste Faure
L’ensemble de manuscrits musicaux de Jean-Baptiste Faure offert au Fonds Pierre-Bassot par Joseph et Édith de Tarragon comprend 82 manuscrits, sur un total de 108 œuvres publiées identifiées, soit plus des trois-quarts de l’œuvre. Ce fonds se répartit en trois groupes : mélodies publiées, œuvres religieuses publiées, œuvres inédites.
Parmi ces manuscrits figurent les deux œuvres les plus célèbres du baryton compositeur, Crucifix et Les Rameaux.
Crucifix (ill.) Jean-Baptiste Faure, Manuscrit musical autographe signé, hymne (1864), sur un poème de Jules Bertrand. Conducteur des voix et de l’orchestre, 6 pages in-f°. Publié dans le premier recueil de ses mélodies.


Les Rameaux (ill.) Jean-Baptiste Faure, Manuscrit musical autographe signé, chant religieux pour trois voix de femme avec solo (1873), sur le poème de Victor Hugo : « Écrit au bas d’un crucifix » (1842). 4 pages in-f°. Publié dans le deuxième recueil de ses mélodies.
Jean-Baptiste Faure fut salué en son temps comme « le roi des chanteurs » (H. de Curzon). Sous le Second Empire il fut le premier baryton-basse de l’Opéra. Accessoirement, il est aussi passé à la postérité comme l’un des grands collectionneurs des Impressionnistes (il fut le banquier et l’associé de leur marchand Paul Durand-Ruel, l’ami de Manet, posséda 67 de ses œuvres dont Le déjeuner sur l’herbe, et, entre autres, autant d’œuvres de Monet).
Nommé professeur de chant au Conservatoire de Paris en 1857, il abandonne rapidement son poste pour suivre une carrière internationale : Londres (où il triomphe à Covent Garden dans le rôle de Don Giovanni), Berlin, Londres, Bruxelles, Genève, plus tard Budapest et Vienne. Londres attirera Faure jusqu’en 1876, il y jouera successivement 21 rôles. Cependant, il entre à l’Opéra de Paris en 1861. Il y chante les œuvres de Mozart, mais surtout les auteurs contemporains : Donizetti, Rossini, Meyerbeer. Il crée à l’Opéra le rôle de Méphisto du Faust de Gounod, celui d’Hamlet dans l’Hamlet d’Ambroise Thomas ou de Rodrigue dans Don Carlos de Verdi.
Très engagé dans la défense du répertoire liturgique et de l’Église, il participe à la création d’oratorios de Charles Gounod et crée en 1887, à l’église de La Madeleine de Paris, le O salutaris de Gabriel Fauré que le compositeur lui a dédié. Partisan du maintien des maîtrises, alors menacées par l’extinction des subventions publiques aux institutions religieuses, il revient dans sa ville natale en avril 1881 pour soutenir celle de la cathédrale, fondée par Mgr de Conny et soutenue par Gounod et Fauré. Il y reçoit un accueil triomphal décrit dans une lettre d’Armand Queyroy (coll. Fonds Pierre-Bassot) : 4 000 à 5 000 personnes l’accompagnent de la gare au théâtre.

Faure est l’auteur d’un traité pédagogique, La Voix et le Chant (1886), et de quatre recueils de mélodies (1873, 1876, 1881 et 1890) formant, avec quelques mélodies isolées, un ensemble de 93 pièces, auxquelles s’ajoutent 29 airs d’église. Curzon, qui n’est pourtant guère complaisant à leur propos, écrit : « Il en est… de si éloquentes, de si vraies, ou simplement d’un tour si heureux, qu’elles méritent de figurer dans l’anthologie la plus sévère du lied français », avec une mention spéciale pour Les Rameaux et Crucifix qui restent aujourd’hui au répertoire des chorales.